"Penser ce qui nous arrive." Hannah Arendt

lundi 2 mars 2009

Temps de crise 6 : la crise est aussi narrative.


Après la phase de sidération où chacun reste muet devant l'avalanche de mauvaises nouvelles ( une avalanche ne s'arrête pas rappelle opportunément Jacques Attali dans son livre , on peut éventuellement la détourner mais quand c'est parti..), vient le temps des premières réflexions, des première mesures , des premiers scénarios de sortie de crise .
Deux caractéristiques de cette phase :
- ces réflexions peuvent se transformer en convictions, servir de point d'appui à des plans l'action mais jamais en certitude; cette période est justement marquée par l'incertitude,une part d'inconnu avec laquelle chacun doit composer ;à tout moment les faits dans leur évolution sont en mesure de rattraper et de balayer leur interprétation. Pas simple pour " les managers de crise" ou il s'agit d'agir, parfois de réagir sans se laisser submerger, faire preuve de souplesse dans l'accompagnement des événements tout en continuant à porter ses propres convictions.. nous y reviendrons.
- le temps de la réflexion et de l'action classiquement disjoints sont ici étroitement mêlés , interagissent l'un sur l'autre: la gravité de la situation amène à penser et mettre en oeuvre des mesures immédiates que la réalité vient parfois détourner , démentir ,annihiler. Pas simple non plus à gérer pour les communicants qui tentent de rendre lisible ou cohérentes les mesures prises.. . nous y reviendrons également.
Pour finir, on peut certainement juger de l'ampleur d'une crise à la largeur du champ des remèdes proposés ou plus exactement au niveau de remise en question des croyances dominantes des acteurs concernés que viennent confronter ces remèdes. Ainsi que les USA d'Obama ( et on peut penser que Bush aurait fait la même chose) soient en train de nationaliser les principales banques américaines pour éviter l'effondrement de leur économie qu'entraînerait leur faillite parait être un fait majeur de cette gestion de crise .
Sont-ils devenus socialistes, enterrant 20 ans de "croyance unique " en la dérégulation des marchés ou s'agit-il de mesures pratiques et ponctuelles ??
L'avenir nous le dira ou plutôt le futur équilibre qui naîtra à l'issue de cette crise nous fournira également un nouveau récit,de nouveaux concepts à partir desquels s'éclaireront le présent et son tumultueux accouchement dans le passé.
En ce sens la crise est aussi narrative c'est à dire un moment où signifiants et signifiés se cherchent de nouveaux liens , les concepts de nouvelles définitions, les croyances de nouveaux objets, une sorte de parenthèse ou peut être de nouvelles histoires vont pouvoir apparaître et exister.