Nouvelles réflexions de François Jullien sur les différences entre pensée occidentale (grecque) et pensée chinoise .Nouvelles réflexions qui s'inscrivent dans un cycle "chantiers"avec des thèmes plus contemporains comme ce lui du changement et de son processus.
D'entrée il présente une hypothèse très parlante pour tous les praticiens du changement : si le changement est difficile à appréhender pour les occidentaux c'est qu'il est difficile à penser en tant que tel par la pensée occidentale. Plus exactement c'est qu'il correspond à une faille de la pensée grecque ,qui peut s'expliquer par le mode de construction originel de chacune de ces pensées.
Pour aller vite si la pensée chinoise valorise le non agir dan la transformation progressive des choses, dans la durée, dans la globalité de leur manifestation pour saisir le moment opportun, celui où l'action est possible; la pensée grecque valorise la transformation par l'action dans l 'ici et maintenant et renvoie au sujet. Elle est focalisée par la recherche de l'être et sa quête de la vérité : difficile pour elle de considérer ce concept central pour décrire la transformation , celui de la transition .
La pensée de la transition :
Ce qui n'est pas encore cette chose nouvelle qui sera le produit de la transformation,ni tout a fait cette chose ancienne qui a déjà commencé à se transformer.
Il donne de très beaux exemples comme celui du voyage en train : quand nous voyageons de Paris en Bretagne et que nous cherchons cet endroit ou tout bascule ,le moment ou nous sommes en Bretagne. Existe-t- il vraiment ? comment penser cette transition?
La transition c’est l’indéterminable par excellence . Alors que le logos des grecs est définition, il découpe des limites entre les genres et les propriétés pour y reconnaître de l’être,La transition par définition nous empêche de dire jusqu’ou va telle propriété ou qualité , ou commence l’autre. La transition défait. La transition, comme celle de la glace devenant eau, est précisément le stade ou entre désidentification et réidentification ,il n’est plus d’identité qu’on puisse sup-poser. La pensée chinoise ne cherche pas de 3ième terme car ‘elle n’aborde pas le réel en terme d’être.
Les figures de modification et de continuation :
La modification intervient de : l’hiver au printemps ou de l’été à l’automne quand le froid s’inverse et tend vers le chaud ou le chaud vers le froid.
La continuation : du printemps à l’été , de l’autômne à l’hiver quand le chaud devient plus chaud ou le froid plus froid
Pas de réponse exact à ce que son ses figures, elles existent, elles opèrent.La transformation en est la part continûment invisible aussi bien dans sa dimension antérieure de gestation que dans celle postérieure de propagation.
Pour un complet renversement :
La transition est imperceptible mais elle conduit sous nos yeux au complet renversement.
Si toute révolution est suivie d’une contre révolution, la transformation silencieuse elle s’installe.
François JULLIEN"Les transformations silencieuses"Grasset, 2009.