C’est une question qui vient à l’esprit quand on visite la plus grande
usine à innovation digitale du monde : et
si au delà des centaines de projets de Start up », au delà des
milliards de valorisation des unicorns, les 23000 entreprises de tec de la
valley étaient en train de réinventer le futur du management de nos entreprises ?
La question est plus sérieuse qu’il n’y paraît car si les
Uber, Airbnb, et autres Blablacar se sont imposés en dynamitant les busines
modèles de l’économie traditionnelle
(transport, l’hôtellerie) ils sont également innové dans leurs modes de fonctionnement : un seul
exemple, pour Uber le système de notation du chauffeur par le voyageur est un
élément clé de son succès tant du point de vue serviciel que managérial.
Modèle économique –
technologie – mode de management ont donc parti lié et ce depuis toujours,
c’est l’industrie et le taylorisme, l’automobile et le fordisme et demain nous
associerons certainement digital et une nouvelle théorie certainement déjà en
cours d’élaboration (autour des concepts de transversal, collaboratif ou
holacratique)
Et si il est encore un peu tôt pour voir une théorie forte
émerger on peut néanmoins percevoir quelques signaux indicateurs du management
de cette nouvelle économie digitale.
C’est ce relevé d’observations que je vous propose de
partager aujourd’hui, comme autant de sujets de réflexion sur l’évolution de la
performance managériale pour nos
entreprises.
# savoir
innover : l’innovation est l’ADN même de la
valley et ça marche depuis près de 40 ans. C’est une affaire de talents et de
moyens financiers bien sur, dont la concentration est ici unique ,mais c’est
aussi une affaire industrielle où tout est processé , rien n’est laissé au
hasard tant la compétition est féroce.
Du business plan au pitch, des
levées de fond à la constitution d’équipe des best practices sont formalisée et
les entrepreneurs stimulés à grandir.
# savoir coopérer : on vous l'annonce tout de suite quand
vous arrivez : "ici tout le monde peut rencontrer tout le monde "(ou
presque). La plupart des VP ou CEO sont accessibles pour un rdv et en général
vous l'obtenez très vite. Mais attention pas plus d'un quart d'heure, une demi
heure exceptionnellement et il vaut mieux bien se préparer, apprendre à pitcher
au risque de ne jamais revoir un interlocuteur que vous n'aurez pas su
captiver.
Au néophyte surpris par cette disponibilité, on raconte
toujours cette légende urbaine de tel investisseur qui n'ayant pas reçu un jeune
homme qui voulait lui proposer un projet formidable a raté un rdv avec le jeune
Zuckerberg et surtout son entrée au capital du futur Facebook. Véritable ou pas
la peur de rater une opportunité semble bien être le ciment de cette coopération véritable
carburant de la dynamique locale.
#savoir se créer des opportunités : c’est un
peu le mot d’ordre tout au long des différentes étapes de création
d’une start up. Rien ne se fait seul et chacun a besoin de tout le monde.
Se créer des opportunités requiert donc 1/un objectif précis 2/ des
comportements d'ouverture l’échange 3/ se rencontrer dans des événements
spécialement conçus. « Ici il n’est pas rare que quelqu’un vous dise
qu’il n’est pas intéressé par votre projet mais que vous devriez voir X ou
Y de sa part » me raconte une start upper
# être rapide dans tout : tout va vite, très vite. En
fait le temps de tous et de tout semble caler sur celui de l'innovation
technologique : autrefois basé sur un cycle d'innovation de 18 mois il
s'est encore accéléré et tend vers les 6 mois.
Cette base est donc le temps nécessaire à l'émergence d'un
projet, mais aussi par extension celui de l'uberrisation ou de la kodackisation
d'une entreprise.
Tout est donc calé sur
cette base : meeting 30', rdv 15', le temps est toujours compté.
Aller vite c'est se donner l'opportunité d'exister face aux X
projets concurrents que connaissent chaque Start up.
# viser le skylable : les projets rencontrés ici
ont tous un niveau maximum d’ambition : devenir un produit à usage mondial à
l’instar des GAFAS. Ce qui évidemment permet de se donner une chance
d’y parvenir ou plus vraisemblablement de construire une brique aux
standards des ces grandes compagnies, qui saura les intéresser.
Penser son projet avec ce maximum d’ambition c’est l’objet
des « groth meeting » hebdo observés dans la plupart des Start up.
# rechercher constamment des financements : le nerf de
la guerre, tous les CEO sont focusés sur la recherche de financement. Ce sont
les financiers ou VC qui posent le cadre à travers différentes étapes du
développement du projet de la pré fondation jusqu'à l'acquisition (ou entrée en
bourse) en passant par les différents tours de levée de fond (pré série
A, série B, série C) .
Sans financement tout s'arrête : et seules 2 Start up sur 10
passe la 1ière étape.
La compétition étant très forte, la compétence à vendre
son projet et le temps passé à lever des fonds sont très importants pour les
fondateurs.
#industrialiser via les process : du
business plan à la levée de fond, du pitch à l'entretien de recrutement tout a
été processé par les différents experts intervenant dans les incubateurs
et autres accélérateurs . La culture est ici celle de l'ingénieur et du
financier où tout se processe et se mesure , s'apprend rapidement pour se
répliquer vite. Et pas très loin du process il y a l’automatisation : tout
ce qui se répète est automatisable
# pivoter : c'est un mot un peu fétiche pour
bien franchir les premières étapes. Il s'agit à tout moment de sa genèse de
faire évoluer le projet de la start up si cela se révèle nécessaire ou si on
vous le demande. Et bien souvent de passer d'un projet de départ très ambitieux
en b2c , à un projet un peu plus facile, un peu moins ambitieux en
b2b . Le b2b est plus facile et plus lent à développer
Plutôt que de mourir pour ses convictions, on est ici plus
attaché à survivre en continuant à développer un projet même si celui ci a
évolué
L’enjeu du pivot c’est l’élasticité du modèle et l’agilité
des équipes et structures.
# transformer le "failed « en expérience : 8 à 9
projets sur 10 selon les sources avortent dès la 1ière étape : c'est dire si la
notion d'échec est importante chez les fondateurs. Mais plus importante est la
capacité de transformer cet échec en expérience. Au vu de l'âge des personnes
tout se passe comme si la valley était aussi une sorte d’université du nouveau
monde. Ici on vous dira souvent dès les 1ières minutes, c'est mon 3ième ou mon
4ième projet et j'ai beaucoup appris depuis. Et tout le monde respecte et
accepte cette nécessaire expérience.
Pour
conclure, on peut dire qu’on ne voit pas encore de véritable modèle managérial
s’imposer mais plutôt des tendances émergées dans des Start up qui
fonctionnent le plus souvent, plus comme
des lab que comme des entreprises .
C’est peut être dans les
RH que s’effectue la plus grande évolution : dans le rapport à
l’entreprise qu’ont la plupart des collaborateurs de ces Start up.
En effet, en signant des contrats pour la durée d’une mission
ils sont de plus en plus considérés et se considèrent eux même comme des
mercenaires, des indépendants fonctionnant en mode projet et ne s’inscrivant
pas dans une relation de longue durée avec leur entreprise.
Une évolution au qui impacts tous les processus RH ,du recrutement à la généralisation des espaces de co working et plus généralement les modes
relationnels à tout niveau.