De quoi le confinement est-il la répétition générale ? Plus le confinement dure, plus il me parait révélateur, comme on dit "du monde d'après". Littéralement. Quand on en sortira, on ne sera plus dans le même monde, c'est du moins mon hypothèse..En effet la pandémie est belle et bien encastrée dans la crise plus ancienne, plus ancienne , plus longue , plus définitive de la situation écologique.Vous me direz, on le savait .Oui mais il nous manquait l'expérience corporelle de cet enchaînement. Qu'est-ce que ça veut dire de changer de lieu ? Une lieu qui n'est plus ouvert , infini mais justement limité, confiné et où il faudra vivre dorénavant. Donc oui pour moi le confinement est une expérience de déplacement au sens propre, de changement de place. Et c'est bel et bien une répétition générale en espérant que cela se passe mieux la prochaine fois .
Vous passez de la question "Où atterrir ?" à la question "Où suis-je ?" .Pour quelle raison? Justement à cause de ce changement de localisation.Je ne me demande pas "qui" je suis , mais "ou" nous nous retrouvons. Et je repère ce déplacement dans les sciences de la terre, ou plutôt dans une nouvelle façon de lier les sciences du système Terre à la condition politique imposée par le confinement, médical d'abord puis par le confinement.
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Pourquoi la question "De qui est-ce je dépends pour subsister ?" est elle la plus pertinente pour repenser notre rapport au territoire ? ...Donc d'un seul coup la question n'est plus de savoir si nous avons assez de ressources à exploiter pour continuer comme avant mais "comment participer au maintien de l'habitabilité du territoire dont nous dépendons?". Cela change complètement le rapport au sol. C'est cela atterrir.
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in Le Monde 13/02/2021, entretien Bruno Latour par Nicolas Truong