"Penser ce qui nous arrive." Hannah Arendt

jeudi 24 juin 2010

Mainstream (2) : chronique d'une nouvelle guerre annoncée

Suite de la chronique du Livre de Frédéric Martel.
Après description de l'industrie américaine de l'entertainment et du concept de soft power, F.Martel brosse une nouvelle géoppolitique des échanges de contenus culturels et médiatiques où les USA encore dominants ne font plus peurs en Inde,Chine, Brésil..
Les cartes sont en train de se redistribuer avec des gagnants ( les pays émergents et aussi les usa ) et les dominés qui faute de moyens ou de ne pas voir la mondialisation comme une opportunité la subissent , le cas de l'Europe.
- de tous les pays émergents, le Brésil est un des plus puissants par la taille de sa population et son économie.En même temps c'est un pays isolé par sa langue,qui a besoin d'autres alliés comme le Vénézuela, l'inde ou la Chine pour lutter contre l'arrogance européenne.
- de par la fragmentation culturelle des pays de l'Amsud, les contenus latinos existent assez peu et sont plutôt produits à Miami ou LA, capitale exogène du Mainstream d'Amsud.
Seuls le Brésil et le Mexique peuvent défendre une industrie locale , pour les autres l'import us domine.
- Même problème dans le monde arabe ou sont apparus dans le golfe des groupes multimédias puissants comme MBC, ART, Al Jazeera. Au delà de l'information , ils entendent créer des industries créatives et lutter contre l'idéologie de l'ouest. Mais à y regarder de plus près le combat des valeurs (famille, tolérance religieuse, rejet de la violence et de la sexualité) est assez proche de celles prônées par ..Disney.
Les oppositions sont internes entre chiites et sunnites, religieux et nationalistes laïcs..
- L'Inde est le géant qui suscite le plus de convoitises ;notamment des américains qui ayant partiellement échoué en Chine, misent sur elle. Elle a le nombre 1,2 milliard mais aussi désormais l'argent et le savoir faire du mainstream. Les Indiens visent à la fois à bâtir une industrie puissante, à affronter les américains sur leur terrain (entrée dans Dreamworks du géant indien Reliance) et contrecarrer la Chine.
Problème : ou ils conservant les standards qui font leur succès ,comme les films "songs and dances" , au détriment de leur capacité d'exportation, ou ils les font évoluer vres un cinéma anglo saxon teinté d'indianité ( ils fabriquent leurs propres "Slumdog millionnaire) et risquent d'être doublés sur leur propre terrain par les américains.
Autre inquiétude ,la baisse des ventes dans le monde arabe, les pays de l'est , gros consommateurs dans les années de guerre froide et de fermeture des frontières, la réussite internationale de Bollywood reste à confirmer.
- L'Asie est elle aussi fragmentée par ses cultures et langues;restent l'Indonésie avec un énorme marché intérieur (230millions d'habitants) et le Japon qui est à l'origine de nombreux standards de contenus (jeux vidéo,dvd,) et de culture pop (manga, personnages, musique)
- La Chine le plus importants des pays et le plus incertain entre capitalisme débridé et étatisme autoritaire.La Chine veut aujourd'hui créer, produire, exporter ses propres contenus et en a les moyens.Mais du fait de la censure et de l'absence de liberté de création ,elle reste un nain en matière de production (pas plus de 50 films par an).Les usa malgré un marché très fermé pèsent 50% du box office avec seulement 10 blockbusters autorisés par an.
Coincé entre modernisation et protectionnisme culturel la Chine fait l'expérience des dangers du repli en période de mondialisation et d'internet: plus une culture se protège, plus elle précipite son déclin.
Côté exploitation, distribution la Chine est un pays émergent où un nouvel écran est en moyenne inauguré chaque jour ,sur lesquels, faute de contenu local suffisant, sont projetés des films us..; ces contradictions ne pourront durer éternellment.