Le match de foot de l'équipe de France quand elle ne veut plus jouer , trouver un nouveau job quand vous êtes trop vieux, trouver un premier job quand vous êtes trop jeune, réussir son couple pour la 3ième fois, sa famille recomposée, orienter ses études quand il n'y a plus de job, tout est ... compliqué !
Et il y aussi aussi parler à son chef, boucler ses fins de mois, trouver un appart, sortir le soir,décider ses vacances, partir en colo (ma fille) .....nous vivons désormais en plein pays Shadock et comme eux nous nous demandons avec la voix de Claude Piéplu : "Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué".
C'est un peu la victoire d'Edgard Morin qui à partir des années 80 développa ce concept de pensée complexe (1) mais peut être pas uniquement.Qu'est-ce qui vient nous compliquer ainsi la vie ? Telle est la question.
Mon sentiment est que cette expression se vulgarise au moment où se télescopent trois phénomènes sans qu'il soit toujours facile ni possible de les distinguer. D'où ce refrain maintes fois repris en choeur parce que ressenti partagé : "c'est compliqué".
Nous avons eu plusieurs fois l'occasion d'analyser ces phénomènes, aussi je me contenterai de les citer :
- 1ier phénomène : les effets de la crise ( déclassement , peur..)
- 2ième phénomène : les effets des mutations en cours (mondialisation, digitalisation , bio, nanotechno..)
-3ième phénomène : la fin de nos certitudes (grands récits, désir de réussite, exigence au bonheur, aller vite ..)
Ces moments sont surtout évocateurs de deux temps distincts : celui fantasmé et regretté d'avant où par opposition les choses étaient simples (l'inverse de compliqué) ,cycliques (les saisons passent et reviennent) et rassurantes : chaque situation à une action directe , connue et reconnue de tous.
Un temps de maintenant ou par opposition les situations demandent une action non mécanique, non coutumière et engendrent de ce fait la perplexité, l'interrogation, la réflexion..voire l'inquiétude et la peur.Un temps ou tout est à chaque fois à reconstruire et chaque position ou rôle social incertain et instable. Un temps où le je dans le présent est surdimensionné et le nous dans le futur assez peu peu évoqué (cf les discussions sur les retraites , l'endettement de l'état et leurs conséquences futures pour les nouvelles générations)
Avoir du mal à imaginer le futur, à avoir des envies, des aspirations, des images , des sentiments c'est peut être cela ,qui , en définitif est compliqué !
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(1)« Quand je parle de complexité, je me réfère au sens latin élémentaire du mot "complexus", "ce qui est tissé ensemble". Les constituants sont différents, mais il faut voir comme dans une tapisserie la figure d’ensemble. Le vrai problème (de réforme de pensée) c’est que nous avons trop bien appris à séparer. Il faut mieux apprendre à relier. Relier, c’est-à-dire pas seulement établir bout à bout une connexion, mais établir une connexion qui se fasse en boucle. Du reste, dans le mot relier, il y a le "re", c’est le retour de la boucle sur elle-même. Or la boucle est autoproductive. A l’origine de la vie, il s’est créé une sorte de boucle, une sorte de machinerie naturelle qui revient sur elle-même et qui produit des éléments toujours plus divers qui vont créer un être complexe qui sera vivant. Le monde lui-même s’est autoproduit de façon très mystérieuse. La connaissance doit avoir aujourd’hui des instruments, des concepts fondamentaux qui permettront de relier. »Edgard Morin