D'après l'atelier Transit City du 25/11 animé par François Bellanger avec Eve Charrin,auteur de l'Inde à l'assaut du monde, comme invité principal. Dans la continuité du travail de l'année sur les nouvelles menaces, après l'atelier de septembre sur la pandémie la question posée était de savoir si l'Inde n'est pas pour nous un miroir de l'accroissement des inégalités. Autrement dit : "que sommes nous en en train d'importer d'Inde en parallèle de nos achats de services technologiques ??1 Le modèle urbain de l'archipel :
Chaque zone urbaine est constitué d'ilots séparés les uns des autres sans beaucoup de liens entre eux.
Ainsi chaque zone possède à la mesure de ses moyens son propre générateur ou système de gestion d'eau, de haut débit...
Les malls ,sièges sociaux de grandes entreprises,centres de recherche délocalisés d'entreprises mondiales, chaque territoire est une île qui grandit et fait rêver la classe moyenne comme les villes nouvelles décentralisées (il en existerait même une en projet résevée aux Non Residents India).
Les habitants de ces ilôts ont souvent plus de communications et de proximité avec leurs cousins migrants volontaires de Londres ou de Californie qu' avec les habitants du slumdog à 50 m de chez eux (et ce malgré les liens d'interdépendance, les uns travaillant pour les autres).
2 Le pari de de l'Inde Hightech :
C'est l'Inde qui gagne ,celle à laquelle chacun s'identifie ou voudrait s'identifier.
C'est aussi le fruit d'une stratégie : percevant qu'elle n'avait pas d'infrastructures fortes ( énergie, routes, réseau ferroviaire) ni de moyens politiques et financiers de le créer rapidement ,l'Inde a choisi dès les années 90 de tirer sa croissance du High tech et du soft ware peu demandeur en énergie. Une stratégie volontairement différente de celle de la Chine.
Les résultats : ce secteur à rapporter 52 milliards $ en 2008 soit 55% des exportations. C'est dix fois plus qu 'en 2000 et +25% par rapport à 2007.
Il continue donc à marcher très fort et surtout à créer des emplois d'ingénieur, de financier, de personnel médical..
L'image vue d'Occident du pays des call center est bien dépassée au moment où 50% des plus grosses entreprises mondiales délocalisent une partie de leur centre de recherche en Inde.
Malgré cela son niveau de développement apparaît au 130ième rang mondial, derrière la Namibie et les inégalités demeurent : la croissance est essentiellement élitiste.
3 La réalité de classe moyenne indienne :
Tout dépend comment on la regarde : avec le standard indien ( le revenu médian des indiens) ou le standard occidental ( les indiens possédant un revenu moyen occidental). Sous le premier angle il s'agit de 300 millions de personnes dont les revenus ne leur permet pas d'acheter des biens de consommation équivalents à ceux de la classe moyenne européenne. Sous le second il s'agit seulement de 50 à 100 millions d'indiens mais dont l'influence est importante dans la société moderne.
4 Les fondements inégalitaires de la nouvelle classe moyenne :
- Le système universitaire de production des élites : produit 500000 à 1 million d'ingénieurs hautement qualifiés chaque année dont certains très recherchés par les occidentaux.En même temps qu'il existe 350 millions d'illétrés amenés à ...le rester
- Le système inégalitaire des castes se perpétue dans ce système où les néobrahmanes travaillent aujourd'hui chez Microsoft après avoir accomplis de brillantes études, convaincus qu'ils sont que leurs ancêtres avaient eux mêmes inventé le 0.
Ce mythe est aujourd'hui très structurant, explique pourquoi les indiens anciens champions de math sont devenus des champions en informatique.
Malgré tout les castes moyennes continuent à dominer l'Inde économique et politique et tout se passe comme si les castes supérieures se sentant menacées par les tentatives d'abolition des années 80 s'étaient échappées par le haut ( effet de surplomb) par les étude et le high tech.
- L'hindouisme dans le sens où la recherche de pureté est une recherche très individualiste qui s'accommode très bien de l'enrichissement individuel et des inégalités ( on a 7 vies après tout c'est autant pour en profiter ou se refaire)
5 La diaspora indienne :
20 millions au total,des batisseurs de Dubaï aux businessmen de la Silicon Valley.
Aux USA la diaspora indienne dispose d'un revenu de 50% supérieur de celui de la middle class américaine. Une émigration d'élite qui se vit en "orbite" ,au dessus de son territoire .Très liée à sa culture elle ne s'intéresse que très peu à ses problèmes d'inégalité et préfèrent embellir sa maison qu'investir l'espace public.
6 Comment cela nous concerne t-il ?
En important des logiciels,des services à bas prix (un ingénieur indien vaut toujours 5 fois moins cher qu'un occidental) il y a importation des inégalités qui les ont produites.
La mondialisation a donc un effet inégalitaire (dans les deux sens)
Cela a pour conséquence de délocaliser des emplois et modifier les relations employeurs -employés sous cette menace.
La stratégie défensive de fuite vers des emplois de plus en plus qualifié est en échec et évolue vers des postes plus politiques, en contact avec les marchés.
"Après deux siècles de nivellement des inégalités au sein des pays occidentaux et d'augmentation de celles ci entre l'occident et le reste du monde,il semblerait qu'un mouvement inverse s'opère. "
En Inde les classes moyennes sont gagnantes, les inégalités explosent par le haut, elles menacent directement l'identité indienne en important des codes occidentaux (habillement, altération de l'accent).
En occident c'est le système social qui est menacé avec un fort retentissement en France où l'espace public est égalitaire , méritocratique; dans la réalité tout ceci ne fonctionne qu'entre soi (personnes de la même classe).