mercredi 14 mars 2018

Commentaire 46 Le Miracle Spinoza 2/2

2 Le maître de sagesse:
#Gilles Deleuze a mis en lumière les 3 personnages qui traversent l'oeuvre de Spinoza :
- l'esclave : l'homme soumis à ses passions tristes
- le tyran : celui qui a besoin d'elles pour assoir son pouvoir
- le prêtre : celui qui s'attriste sur la condition humaine.
Les 3 partagent un ressentiment contre la vie et constituent une trinité moraliste.
Tout le parcours de l'Ethique est donc un chemin de la servitude vers la liberté, de la tristesse vers la joie.
A la suite de Descartes il est convaincu que le la structure du monde est mathématique que l'exposition d'un problème et de sa solution sera d'autant plus parfaite qu'elle épousera la forme d'un exposé de manière géométrique.C'est ainsi que son ouvrage s'intitule : l'Ethique démontrée selon la méthode géométrique.
Il y propose des définitions (explications des mots choisis) , suivies  d'axiomes (exprime une notion commune à la raison) et de propositions (affirmation d'une thèse)
L'ambition est de proposer une éthique ,un chemin conduisant à une vie bonne et heureuse.

#Le Dieu de Spinoza n'a pas créé le monde, il ne lui est pas extérieur et donc totalement immanent.
C'est la substance de tout ce qui est.
Le humains sont toujours à la recherche du "pourquoi des choses" , ils cherchent un sens au monde , aux phénomènes naturels et à leur existence.L'explication par la cause finale les apaise: les choses existent d'une certaine manière afin d'aboutir à tel but.
Ils ont ainsi admis que les dieux disposent tout à l'usage des hommes pour se les attacher et être grandement honorés par eux. Ainsi ce préjugé est devenu superstition.
Ce sont les principes finaliste (tout est fait dans la nature pour le bien de l'homme ) et  utilitariste (je donne quelque chose à Dieu pour qu'il m'apporte sa protection) qui d'un point de vue philosophique sont à l'origine des grandes religions.
Il récuse la représentation d'un dieu anthropomorphique qui crée le monde à partir de rien pour l'idée d'une substance qui se suffit à elle même, parfaitement autonome, unique et aussi infinie.
Il a une vision moniste du monde qui s'oppose à la vision traditionnelle dualiste d'un Dieu distinct du monde.
Pour lui Dieu et le monde ne font qu'un.
Il ne croit pas au Dieu révélé de la bible, mais il pense Dieu.
Ni matérialiste, ni spiritualiste, il est les deux.

#Contrairement à Descartes, il ne considère corps et l'esprit comme deux substances différentes mais comme une seule et même réalité selon deux modes différents. Le corps et l'esprit sont de nature aussi divine et ont autant de dignité.
Cette vision d'union substantielle a des conséquences dans tous les domaines : de la médecine à la spiritualité, dans la vie quotidienne, la relation aux autres.
Le clivage fondamental au sein de l'être humain ne sépare pas deux parties, l'âme du corps, mais deux affects: la joie de la tristesse.
Chaque organisme s'efforce de progresser, de grandi, d parvenir à une plus grande perfection.Il vise ainsi à augmenter sa puissance.
L'augmentation de cette puissance s'accompagne d'un sentiment de joie, tandis que la diminution d'un sentiment de tristesse." La joie est le passage d'une moindre à une plus grande perfection"
L'objectif de l'éthique spinoziste consiste à organiser sa vie ,grâce à la raison pour diminuer la tristesse et augmenter la joie jusqu'à la béatitude suprême.
Il distingue deux modes fondamentaux de connaissance :
- le 1ier genre uniquement constitué de rencontres avec les corps et les idées extérieures qui affectent notre corps et notre esprit.(ce qui ne correspond pas à la réalité objective mais à la représentation qu'on s'en fait)
- le second ,qui dépasse le 1ier mode imparfait grâce au développement de la raison, s'appuie sur des notions communes à tous les hommes.
Selon que note mode de connaissance est davantage lié à notre imagination ou à la raison, la joie qui découlera ne sera pas de m^me nature.

#Spinoza nous invite à ne pas construire le modèle d'humanité en fonction duquel nous jugerions des actions humaines, mais à prendre l'être humain tel qu'il est, dans sa nature à la fois universelle et singulière, et à ne juger des actions qu'en fonctions des raisons, des causes profondes qui les ont motivées.
Après Jésus qui ne cessait de répéter "Ne jugez pas" et avant Freud qui a exploré l'inconscient, Spinoza a parfaitement explicité combien l'homme restait une énigme pour lui même.

D'ailleurs Freud a écrit en 1931 :" J'admets tout à fait ma dépendance à l'égard de la doctrine de Spinoza.Il n'y a aucune raison que je mentionne son nom, puisque j'ai construit mes hypothèses à partir du climat qu'il a créé plutôt qu'à partir d'une étude de son oeuvre."

#Spinoza cherche à élaborer une véritable science des affects.Il pose trois sentiments de base :
- le désir, qui exprime notre effort pour persévérer dans notre être
- la joie qui permet l'augmentation de notre puissance d'agir
- la tristesse qui diminue notre notre puissance d'agir

#L'effort que nous faisons pour persévérer et grandir dans notre être, le conatus est très important
Cet effort lorsqu'il se rapporte à l'esprit seul s'appelle volonté; lorsqu'il se rapporte au corps et à l'esprit, il le nomme appétit.
Le désir est l'essence de l'homme. Il  n'a en soi rien de mauvais, bien au contraire.
Ne plus rien désirer c'est éteindre la flamme de la vie.
La sagesse ne consiste donc pas à brimer l'élan vital mais à le soutenir, à le guider
Le désir n'exprime pas un manque mais une puissance répond Spinoza à Platon.
L'ascèse , le renoncement au désir , n'est pas une vertu mais une diminution d cela puissance.
La seule force qui peu nous faire changer c'est le désir.
"Un sentiment ne peut être contrarié ou supprimé que par un sentiment plus fort que le sentiment à contrarier."Le rôle de la raison consiste donc à repérer une chose ou une personne susceptible d'éveiller en nous un sentiment positif , plus grand que l'affect négatif qui nous plonge dans la tristesse , et donc capable d'éveiller nouveau désir.

# Comme l'enseignement de Jésus conduit à la joie, la philosophie de Spinoza et une philosophie de la joie.
Sa conception du désir et de l'affectivité continue une rupture profonde avec la tradition philosophique et religieuse classique.
On oppose classiquement affectivité à raison
Il remplace cette dualité par la dualité activité/passivité.
Ce qui constitue un mal n'est pas l'affectivité ou le désir, mais la passivité dans l'affectivité. Il s'agit donc de la convertir en activité.

#"Nous désirons aucune chose parce que nous la jugeons bonne , mais au contraire, nous appelons bon ce que nous désirons."
C'est le désir qui nous fait apprécier une chose et non l'inverse : voilà qui renverse toute morale traditionnelle.
Une seule conduite : se mettre en quête de ce qui nous met en joie et fuir ce qui nous rend triste.Favoriser les rencontres qui nous font grandirai éviter celles qui nous diminuent.
Une véritable révolution copernicienne de la morale : la vraie morale ne consiste plus à suivre les règles extérieures , mais à comprendre les lois de la nature universelle  et de notre nature singulière afin d'augmenter notre puissance.
L'éthique immanente et rationnelle du bon et du mauvais remplace ainsi la morale transcendante et irrationnelle du bien et du mal.

#La question de la liberté est au coeur du projet : pour lui et contrairement à Descartes le libre arbitre n'est q'une illusion.
C'est parce que nous n'avons aucune conscience des causes qui motivent nos actions ,que nous nous pensons libres.Jung ne dira pas autre chose.

La liberté existe mais il faut le redéfinir:
1/ "Est dite libre la chose qui existe d'après la seule nécessité de sa nature et est déterminée par soi seule à agir. "A cet égard ,seul Dieu est cause libre.
2/L'être humain est d'autant plus libre  qu'il agit selon sa propre nature, son son essence singulière et non pas seulement sous l'influence des causes qui lui sont extérieures.
Nous sommes libres parce que nous agissons grâce à la raison , à partit de notre nature sic-nguière et non sous l'influence des causes extérieures.
Ere libre c'est être pleinement soi même
Etre soi même c'est répondre aux déterminations de sa nature.
La libération de la servitude augmente notre puissance d'agir et et notre joie, pour nous conduire jusqu'à la joie finie de la béatitude.Pour cela un niveau 3 de connaissance est nécessaire : l'intuition
Les 3 niveaux de connaissance :
niveau 1 : opinion ; imagination
niveau 2 : raison
niveau 3 : intuition grâce à laquelle on peut saisir la relation entre une chose finie et une chose infinie, entre nous et Dieu, entre notre cosmos intime et le cosmos entier.
Toute l'éthique de Spinoza commence par une connaissance rationnelle de Dieu et finit par un amour de Dieu.
Au cour de cette sagesse de l'amour de Dieu  il ya l'éternité : un instant hors du temps  qui n'a ni commencement ni fin.
De la même façon l'esprit se perçoit éternel dans le sens où il se sent exister de manière intemporelle avec la même nécessité sue l'éternité de la vie de Dieu.
notre esprit ne disparait pas avec la mort: la part passive, l'imagination disparait mais pas la part active (raison).
Cela  a évidemment suscité de nombreux commentaires