mercredi 2 octobre 2013

La Condition numérique (1)

Notes et commentaires à partir de l'excellent livre de Bruno Patino et Jean François Fogel.

1/ L'avénement de la connexion permanente : malgré toutes les évolutions technologiques (portables, consoles, tablettes..) l'homo sapiens n'est pas encore devenu homo numericus.
Ce qui change c'est avant tout le temps de la connexion permanente toute innovation finit par être dépassée , seule la connexion demeure.
L'histoire d'un internet :c'est d'abord la construction d'un nouveau  média:
- la création du 1ier navigateur Netscape pour voguer de page en page et de site en site
- la mise ne ligne du 1ier moteur de recherche efficace : Google
Puis le passage du média à l'espace social avec :
- le 23/04/2005 la 1ière vidéo mise en ligne "moi au zoo" et par la même la création de You Tube,1ière plateforme.(Jawed Karim)
- le 21/03/2006 l'envoi du 1ier Tweet avec une nouvelle techno : Twitter , un microblog envoyant des messages instantané (Jack Dorsey)
- le 26/09/2006 le réseau étudiant Facebook passe en accès libre
- le 09/01/2007 Steve Job présente l'iPhone d'Apple , un tel portable qui est aussi une plateforme de services formatés

Du Média à l'espace social :
Aucune de ces innovations n'a changé le quotidien des internautes mais leur adoption simultanée par une audience massive change internet du tout au tout:
Internet n'est plus un média, il se trouve être exactement le contraire de ce qui caractérise un média : la diffusion d'un contenu à partir d'une source unique.
Sur Internet tout récepteur est un diffuseur potentiel et les échanges massifs de recommandation l'emporte de loin sur les messages traditionnels.
La viralité sociale est devenue la dynamique d'Internet
Seul ensemble ,pourrait être l'expression de ce nouvel espace, qui appartient au champ social et interdit : l'isolement (mais pas la solitude)

L'immédiateté :
"Si nous vivons un âge de l'information, qu'est ce que nos enfants savent , que nous ne savions pas ?
La réponse c'est maintenant.Ils savent à propose de maintenant."
L'axe principal d'Internet n'est pas l'espace mais bien le temps.
Avant Internet l'expérience était une chose lente : approcher la chose , la connaître pour un jour la maîtriser. L'expérience numérique est autre : elle tient du flux, du rapport immédiat à la chose et de la sensation de ce rapport.
Showtime du spectacle occasionnel d'autrefois a été remplacé par Prime time, rdv médiatique quotidien, supplanté par le Breaking News  du flux numérique
Cette soumission à l'instantané entraîne :
-> une place plus grande au choc, à la surprise , à l'émotion
-> une narration fragmentée d'ajouts successifs
-> un univers fait d'alertes, de messages, de commentaires où  le désordre est actualisé en permanence
La popularité des jeux électroniques à précédé Internet et le passage de l'un à l'autre offre une continuité.

L'extension du réel :
Vouloir vivre au présent mène à une situation de pénurie : le temps manque
Tout est au bout de la connexion : du spirituel au temporel
Et des générations d'internautes ne cessent d'accentuer le phénomène :
- la G1 celle de la connexion temporaire ;gardent dans leur DD leurs données qu'ils stockent
- La G2 celle de la connexion permanente , toujours connectée; classe leurs données sur des plateformes
- La G3 celle du nuage , toujours connectée et dispose au bout de sa connexion de tous ses contenus et données privées.
Quand Internet propose d'agir sur le réel avec des réseaux sociaux , des appris, des interfaces de site, aucun doute n'est permis : c'est une extension du réel

2/ L'identité de l'internaute :
Internet écarte les repères utilisés depuis l'invention de la carte et de la pendule
C'est donc un univers social, temporel et spatial en réinvention totale que chacun se construit sa vie numérique

Une identité éclatée :
Depuis 2007 un internaute est dépassé par son ombre numérique c'est à dire que la majorité des données le concernant n'ont pas été produites par lui.
En 2010 une étude menée sur 50 sites des plus fréquentés constate que sur chaque page il est réalisé une moyenne de 10 collectes d'informations sur le visiteur.

3/ L'engagement :
Les échanges massifs ne sont pas des échanges personnels mais relèvent bien d'une activité déployée dans un espace social où les effets sont visibles de tous.
L'engagement de l'internaute n'a cessé de monter, année après année et se doit d'être de tous les instants.
Internet vit une mutation : de l'internaute individualiste des débuts à l'internaute mobilisé par son engagement dans les réseaux sociaux

Les interfaces de l'engagement :
Il se passe des canaux autrefois établi pour les relations sociales : conversation, courrier.Il va plus vite, est plus direct.
"L'essentiel du développement d'Internet depuis les années 70 s'est fait par deux caractéristiques : le fait de donner l pouvoir aux utilisateurs avec un fort niveau de contrôle ou d'autorité; la faculté offerte aux utilisateurs de développer des relations avec d'autres utilisateurs ". Jonnhy Ryan
L'internaute est à la fois le sujet et l'objet de ses actions.
Les outils et processus mis au service de l'engagement l'ont rendu si productif que pendant plusieurs années , on a surtout tenté de mesurer les relations sociales sur le réseau.

L'anthropologue Robin Dunbar qui a travaillé sur une corrélation entre les groupes sociaux et la taille du cortex (notamment chez les primates) a établi une loi pour l'homme , selon laquelle la taille moyenne d'un groupe humain engagé dans une vie sociale est à 140 individus.Même avec un coefficient d'erreurs à 100% , on est très loin des groupes relationnels créés par les réseaux sociaux.

Le passé présent :
Dans tous les groupes linguistiques étudiés il existe une convention ou le passé est derrière nous et le futur devant;
L'engagement sur Internet procède d'un effet rétro , d'un écho à ce qui a déjà été publié.
Tout le monde peut se saisir du passé d'un individu, disponible en permanence.

L'espace émotionnel :
L'apparition d'Internet coincide avec les débuts des travaux sur l'intelligence émotionnelle et ce n'est pas anodin.
Internet est un théâtre des émotions, qui a connu une réception identique à la tv : d'abord  perçu comme un média émotionnel par les médias sérieux et froids de l'écrit.
Interpellé pas chaque message, l'internaute est également bombardé de messages, qui créent les conditions classiques d'un stress : une situation ou la réponse émotionnelle est le seul mode de  gestion possible.
L'engagement de l'internaute n'est pas une simple impulsion électronique : en disant qu'il aime un contenu, il donne une petite part de soi;il s'expose car ce choix risque d'être déjugé par les autres.
Il met son émotion sur le marché, agissant comme un DM, qui n'oublie jamais ses clients (amis , suiveurs) , qui se sait construire sa marque en permanence et ne peut ignorer les résultats d'études de marché ( commentaires, reprises, retweets).