vendredi 24 octobre 2014

Isaac Asimov inventeur du brain storming

C’est mon ami Bébert qui m’a averti de ce texte d’Asimov publié par Robin Prudent pour rue 89. Evidemment un article sur la créativité d’Asimov, un de nos auteurs fétiches de nos jeunes années, on était obligé de regarder de plus près. A quand celui de P .K  Dick sur le même sujet.

« En 1959, l’écrivain de science-fiction Isaac Asimov avait participé à des recherches collectives à propos d’un bouclier antimissile pour l’armée américaine. C’est son ami, le scientifique Arthur Obermayer, qui l’avait invité à se joindre à des sessions de réflexions autour du projet militaire de l’Agence pour les projets de recherche avancée de défense (Darpa).Asimov ne participa qu’à quelques réunions, de peur que sa liberté d’expression ne soit limitée par les informations confidentielles qu’il allait devoir traiter. Mais ce passage ne fut pas anodin, puisqu’il laissa derrière lui un texte (en anglais) sur la créativité.Plus d’un demi-siècle plus tard, son ami scientifique est retombé dessus et a décidé de le publier. Voici ses principaux conseils qu’il donne pour faire émerger une idée géniale. 
1 Rassembler des connaisseurs et des excentriques
Pour Isaac Asimov, le processus de créativité est similaire dans tous les domaines de recherche. La grande idée ne sort pas de nulle part, mais d’une connexion inattendue de plusieurs faits ou idées déjà étudiés. Pour faire émerger un concept inédit, il faut donc rassembler des personnes ayant des connaissances fines du sujet en question et d’autres qui n’ont pas peur de proposer des rapprochements un peu fous.
Si cette connexion n’a pas nécessité d’audace, c’est qu’elle n’est qu’une idée corollaire à une idée plus ancienne. Une grande innovation ne devient raisonnable qu’après avoir émergé.
2 Créer une ambiance de travail ouverte aux réflexions stupides
Une fois les bonnes personnes rassemblées autour d’une même table, rien n’est encore gagné. Isaac Asimov cherche alors le moyen de les persuader de laisser libre cours à leur imagination. Pour cela, il faut une grande liberté de ton et de propos.
« Le plus important est de laisser une certaine quiétude et permissivité. Le monde, en général, désapprouve la créativité, et être créatif en public est particulièrement mal vu. Même émettre une supposition en public semble inquiétant. [En session de réflexion] les personnes doivent avoir le sentiment qu’on ne les désapprouvera pas. »
Ainsi, deux types de personnes doivent être écartés de ces sessions :
            ceux qui ne seraient pas prêts à entendre des idées stupides et déstabiliseraient ainsi les autres ;
            et ceux qui auraient une réputation à ne pas perdre ou une autorité trop forte et réduiraient l’assemblée à une obéissance passive.
L’écrivain insiste :
« Même si ces personnes sont individuellement très intéressantes, elles risquent de neutraliser les autres. »
3 Pas plus de cinq participants en même temps
Isaac Assimov met aussi en garde contre la volonté de multiplier les membres de ces sessions de réflexions.
« Le nombre optimal de personne dans chaque groupe ne doit pas être très élevé. Pas plus de cinq personnes ne sont nécessaires. Un nombre plus élevé de personnes permettrait d’apporter davantage d’informations, mais la tension créée par l’attente de pouvoir s’exprimer peut devenir très frustrante. »
L’auteur préconise donc de faire varier les participants plutôt que d’imposer la venue de tout le monde, en même temps.
4 Cultiver l’informel et éliminer le sentiment de responsabilité
Malgré le caractère très sérieux des recherches militaires auxquels il participe, Isaac Asimov préconise de cultiver une certaine légèreté dans ces sessions de recherche.
« La jovialité, l’usage des prénoms, les blagues, sont – je pense – à l’origine des idées. Pas en eux-mêmes, mais parce qu’ils participent à l’enthousiasme qui doit accompagner de la folie créatrice. »
Ainsi, il délaisse volontiers les salles de conférences austères pour réunir les groupes chez l’un des participants ou autour d’un dîner au restaurant.
De plus, le fait de se sentir coupable de ne pas avoir eu une de bonne idée est la manière la plus sûr de ne jamais faire émerger cette bonne idée.
« La chose qui inhibe le plus cette créativité, est sûrement le sentiment de responsabilité. Les plus grandes idées des derniers siècles sont venues de personnes qui n’étaient pas payées pour avoir cette idée. [...] Les idées sortent des portes secondaires. »
5 Trouver un psychanalyste et un arbitre
Pour faire émerger des idées enfouies profondément, il faut aider les participants à stimuler leur créativité.
« Il faut qu’une personne ait un rôle proche de celui du psychanalyste, c’est-à-dire poser les bonnes questions pour laisser les personnes parler de leur passé afin d’obtenir de nouvelles connaissances. »
Les sessions de réflexions collectives ne doivent pas non plus être en dehors de toutes règles. Pour cela, un autre personnage clé doit être présent : l’arbitre. Selon Isaac Asimov, celui-ci doit poser des repères dans le débat et guider les réflexions vers le sujet central.
Si vous respectez ces règles, les dispositifs artificiels pour stimuler la créativité ne vous seront plus être nécessaires selon l’auteur. Les idées ne devraient pas tarder à arriver. »

Ce que je trouve formidable c’est que 60 ans après cette technique s’est tellement développée qu’elle est aujourd’hui au cœur de la plupart des processus d’innovation ,au point d’être devenue un outil de base de certaines disciplines  comme le marketing ou la  communication. (même si les techniques d’animation varient considérablement selon les sujets)

Mieux je pense qu’elle a fortement contribué à la revalorisation des processus de créativité dans l’entreprise en générale et dans les pratiques innovantes en particulier.