lundi 14 mars 2016

Commentaires 30 : Et si on refondait notre démocratie 1/2 ?

La démocratie a été happé par le principe de  représentation , elle n'est gouvernée que par lui et elle est en est prisonnière; elle a été  également engloutie par le marché qui lui impose ses lois jusqu'à la caricature.
Loin des querelles politiciennes et partisanes , le livre du constitutionnaliste Dominique Rousseau se veut une critique constructive et apaisée de nos institutions et au delà de notre système démocratique.
Au delà des incohérences politiques , des populismes  et de la montée de la défiance vis à vis des élus  ,il fait le constat que l'idée démocratique vit dans les quartiers, les villes , les écoles, les entreprises portés par des collectifs informels de citoyens.
Ces expériences manifestent une forme nouvelle de démocratie qui n'a pas encore trouvé son nom alors que l'ancienne ,la démocratie représentative ou démocratie électorale.
Celle qui émerge entre l'opinion et le participatif , il propose de la nommer démocratie continue.
1 Les principes de la démocratie continue :
# Le principe de la représentation écart : le principe de représentation est au fondement de la démocratie. 
Spontanément au sommet des valeurs constitutionnelles , on trouve la démocratie directe.
Cette idée est plutôt fausse car la représentation est la condition de la démocratie.
Sans représentation on est dans l'agrégat des hommes en fonction de leurs intérêts et affinités , autrement dit le communautarisme.
La représentation est "une scène "permettant aux hommes de sortir de leur détermination sociale pour se représenter comme des être égaux en droit,principe de l'égalité politique.
Pour qu'il y ait contrôle des décisions et donc responsabilité politique,  il faut que s'installe un couple représentant qui prend les décisions et celui du peuple par lequel et devant lequel s'exercent le contrôle et la responsabilité.
Ce principe  d'écart est fondateur et tragique au sens où il permet à la fois à la démocratie d'exister autant qu'il peut l'étouffer par l'agrandissement de cet écart   au fil du temps entre pensée du représentant et pensée du représenté.

#La logique démocratique de la représentation écart : la logique de représentation du système représentatif est une représentation fusion , qui se tait , celle que l'on a connu durant des décennies.
Celle de la représentation écart dans la démocratie continue est la représentation -écart, c'est à dire de continuer à vouloir s'exprimer et agir, ce qui change tout.
La représentation fusion n'est que la reproduction du principe monarchique ou le corps de la Nation et le corps du Roi ne font qu'un.
Mais il n'est pas obligatoire de le penser ainsi : on peut également le penser comme le représentation de deux corps, celui des représentés et celui des représentants,chacun jouissant d'un espace de prérogatives propres.
Aux représentants la tâche de statuer avec l'aménagement d'un espace et de prérogatives dédiées; aux représentés la tâche de réclamer, de contrôler.
Il faudra attendre 1958 et la création du Conseil constitutionnel pour créer cette autorité de contrôle et plus encore la reconnaissance en 2008 du fait pour tout justiciable de contester la constitutionnalité de la loi.

2 Le principe juridique : le peuple constitutionnel
# Le peuple est le référent obligé de la démocratie.
Il faut revenir à Cicéron dans la Démocratie qui distingue et oppose la foule (multitude) , réunion sans forme d'individus et le peuple (populus) qui ne se constitue que si sa cohésion est maintenue par un accord sur le droit .
La constitution a donc pour rôle de transformer une association primaire d'individus en une association politique de citoyens.
Elle fabrique aussi le peuple des individus démocratiques en donnant également le droit à chacun d'intervenir et d'agir dans toutes les sphères de la Cité 
#L'individu démocratique figure de la démocratie continue
Si le processus social et historique est celui d'une société d'individus, la question politique se déplace;elle devient celle de l'organisation de cette fluidité sociale pour qu'elle ne produise pas une société chaotique; les réponses du passé ( Dieu,Nation, Etat) ne fonctionnant plus, la question est celle du socle permettant de construire du commun.
La Constitution entendue comme ensemble des droits et libertés , peut être cet instrument commun aux individus.
C'est indispensable car , comme le dit Cicéron, si le peuple ne se reconnait pas dans un accord sur le droit, il se reconnaît par d'autres accords , d'autres liens ,sur le sang, la race ou le chef-incarnation-du peuple.

3Le principe sociologique : la société d'individus
# L'état de la démocratie représentative : séparation des pouvoirs et suffrage universel.
La théorie de Montesquieu de la séparation des pouvoirs permet de distinguer la forme absolutiste de l'état ou les pouvoirs sont confondus de la forme démocratique où ils sont divisés.
Les 3 croyances qui sous tendent notre époque : 1/démocratiser l'état c'est démocratiser la société parce quils sont forcément confondus 2/ le mal démocratique proviendrait de la seule Constitution de la V° République qu'il conviendrait de changer 3/ Le suffrage universel comme principe suffisant et indépassable de la démocratie
Ainsi l'origine électorale d'une institution resterait un marqueur fort de sa qualité démocratique. Pas évident
La démocratie continue ne se cherche , ni ne se trouve dans un nouvel aménagement institutionnel de la sphère étatique, ni dans le perfectionnement du système électoral.Elle prend son sens propre ailleurs que dans l'Etat : dans la société.
#La société de la démocratie continue : critique du principe de souveraineté et espace public : si le lien constitution/société (là ou il y a de la société, il y a su droit)  est ontologique, celui de constitution/état est historique.Et se dernier se distend du fait de l'effacement de la figure étatique : l'Etat perd son territoire (frontières, communication, maladies, catastrophes) , l'Etat perd son peuple (Europe),  l'Etat perd sa souveraineté (fabriquer la loi, battre monnaie,rendre la justice, décider de la guerre et de la paix)
L'Etat est une forme inventée au Moyen âge aujourd'hui décalée.
La démocratie continue ne se construit pas avec l'état mais avec l'espace public , selon la représentation hégélienne composée d'un espace civil (celui des intérêts privés des individus ) et d'un espace politique (institutions publiques, représentation, état)
Ces deux espaces se seraient progressivement séparés , l'espace politique sortant de l'espace civil pour mieux le gérer; il serait possible de proposer selon Habermas un autre schéma où l'espace public s'intercalerait entre les deux. 
L'espace public serait le lieu qui reçoit par le canal des associations, des mouvements sociaux, des écrits, les idées produites dans l'espace civil et où se construisent une  opinion publique portée ensuite dans l'espace politique.
L'espace public devient ainsi le plus important, le lieu où toutes les questions de l'espace civil sont travaillées pour aboutir à la formulation de réponses et de propositions.
C'est un espace de luttes et de controverse.
C'est aussi le lieu qui par la mobilisation de ses acteurs construit une force capable d'imposer à l'espace politique des questions sur lesquelles il s'est mobilisé.
#L'espace monde , horizon de la démocratie continue
Fonder la démocratie sur l'espace public n'est pas seulement la désétatiser , c'est la mondialiser ou lui donner le monde comme horizon.
C'est par une attention partagée sur les m^mes problèmes, une perception d'un commun mondial qu'émerge le citoyen du monde.